BOURGOGNE – Beaune
L'ÉQUIPE
EN 2009, LAURIANE ANDRÉ A 29 ANS. DRH DANS UNE FILIALE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS, ELLE NE CONNAÎT PAS LE VIN. POURTANT, QUAND SES BEAUX-PARENTS CHERCHENT À CÉDER LEUR DOMAINE, C’EST ELLE QUI ACCEPTE DE PRENDRE LEUR SUITE. PAR ENVIE DE PARTAGE. PAR ESPRIT D’ENTREPRISE. PARCE QUE LE CHALLENGE NE LUI FAIT PAS PEUR. C’EST MÊME SON MOTEUR.
À l’origine, il y a Françoise et Michel André. Les beaux-parents de Lauriane André. Alors expert-comptable, Michel André déguste un Savigny-lès-Beaune 1er cru Les Vergelesses blanc. Une claque. Il se promet d’acheter des vignes sur ce terroir. Un jour. L’occasion se présente en 1983. Le couple acquiert un lot en rouge et en blanc. C’est la naissance du Domaine des Terregelesses. Néophytes, Françoise et Michel confient la gestion à Sylvain Pitiot. Il en sera le régisseur de 1983 à 1990. Pendant sept ans, il étudie la nature des sols. Plante du chardonnay sur Chorey. Le premier chorey-les-beaune blanc en Bourgogne. Après son départ, le Comte Senard et sa fille Lorraine reprennent le flambeau de régisseur. Jusqu’en 2009. Quand Françoise et Michel décident de transmettre les vignes à leurs fils. Bien qu’attachés au domaine, aucun de leurs trois garçons ne souhaite pourtant se reconvertir. Pour autant, pas question de vendre. Alors on propose à Lauriane, l’épouse de l’un des enfants. Mariée à un bourguignon, elle a appris à aimer le vin et accepte l’offre. Pendant des mois, elle se forme. En viticulture et en œnologie. Puis en agriculture. Elle s’entoure de Jérôme Desprès pour la partie technique. Un tandem de choc qui conduit tout le domaine à se convertir au bio. Qui renomme le vignoble Domaine Françoise André, du nom de sa fondatrice. La greffe avait pris.
« En 2010, on nous a fixé un objectif avec Jérôme. Augmenter la qualité des vins. Pour nous, cela passait par un passage en bio. »
LE TERROIR
DE POMMARD À CORTON, LE VIGNOBLE DU DOMAINE FRANÇOISE ANDRÉ S’ÉTEND SUR 10 HA. IL ATTEINDRA PEUT-ÊTRE UN JOUR 12 OU 13. MAIS PAS PLUS. CAR LAURIANE ET JÉRÔME CHERCHENT À GARDER TOUTE LA MAÎTRISE DE CE RICHE TERROIR. POUR DÉLIVRER LE MEILLEUR DE CE QU’OFFRENT LES SOLS DU DOMAINE.
Quand ils reprennent les rênes du domaine, Lauriane André et Jérôme Desprès affrontent trois années de disette en termes de rendements. La terre est fatiguée. Durcie par les traitements. Il faut remettre de la vie dans ces sols. Un travail au long cours. Chaque fois que la pluie tombe et empêche de rentrer dans la vigne, ils recommencent leur ouvrage. Inlassablement. Ce rôle d’accompagnateurs de la vigne est difficile. Mais il les comble. Comme des parents, ils font grandir les pieds. Cherchent à sublimer les terroirs. À ne surtout pas gommer leurs effets. Sur Pernand, par exemple, le sol est argilo-calcaire. Il donne un Corton-Charlemagne frais. Minéral. Un grand cru renommé. Mais le duo est perfectionniste. Aime les nouveaux défis. Se met en tête de racheter le Pommard « Les Vaumuriens » à Jean-François Coche-Dury. Au culot. Les prétendants étaient nombreux. Mais ce sont eux que choisit le propriétaire du domaine mythique de la côte de Beaune. Comme une consécration pour Lauriane et Jérôme. Et toute la famille André.
« Les sols en bio permettent de mieux gérer les extrêmes. Moins de souffrance hydrique et meilleur écoulement des eaux de pluie. »
LA FAÇON DE FAIRE LE VIN
SUR LE DOMAINE DE LAURIANE ANDRÉ, LA VINIFICATION EST UN ART. ÉTAPE APRÈS ÉTAPE. LES VENDANGES ? MANUELLES. LA SÉLECTION DES RAISINS ? MINUTIEUSE. ET LA SURVEILLANCE DES CUVÉES ? QUOTIDIENNE. POUR ELLE, LA GARANTIE DE VRAIS VINS DE TERROIRS.
Dans la vigne comme en cave, Lauriane André et Jérôme Desprès travaillent en équipe. Ils partagent l’ambition de jouer au plus juste, en mono-cépage, on ne peut pas jouer sur les assemblages. Pour cela, ils se remettent en question. Tous les ans. Font des essais. Réajustent. Tous les jours. En rouge, ils laissent macérer pendant une semaine. À dix degrés précisément. Puis le vin fermente. Et si cette étape est facile dans les plus grosses cuves, les petites ont besoin d’aide. Alors comme on sait le faire, on les accompagne. En les chauffant. Tout simplement. En fonction des cuvées, on effectue aussi 3, 4, 5 voire 6 pigeages. Mais ça, au Domaine Françoise André, on ne le décide pas à l’avance. On le détermine grâce aux dégustations. Parce que c’est un savoir-faire humain. Unique. Pour les blancs, on respecte une autre temporalité. On presse vite. Juste avant de laisser la fermentation se faire. Pendant 3 à 4 semaines. Et directement en fûts, pour un goût boisé plus subtil. Vient enfin la mise en bouteille. Toujours en jour fruit. Car si le duo ne vise pas forcément la certification en biodynamie, il sait qu’il y arrivera. Par amour des arômes.
Au chai comme en cuverie, tout est parfaitement tenu. Jérôme met un point d’honneur à l’alignement des barriques. En cuverie, le tandem agit de concert. Pigeages à la main. Au pied. Remontages. Échanges. Écoute. Réassurance. Partage. Délégation. Tout est en harmonie. La même philosophie. Pour viser le meilleur. En toute humilité.