Pratique viticole moins connue que les célèbres vendanges, la taille est pourtant un rendez-vous annuel important pour la viticulture. Outre le fait de donner la forme souhaitée au pied ou de participer à limiter le rendement de la vigne, la lutte contre les maladies du bois est aujourd’hui au cœur des préoccupations de nombreux artisans vigneron·ne·s. Ainsi, de nouvelles approches sont venues enrichir le savoir-faire existant. Dans le but de produire le meilleur vin possible.
LA TAILLE, QU’EST-CE QUE C’EST ?
La taille est une pratique viticole qui consiste à couper les bois superflus de l’année précédente. Il s’agit bien sûr de dompter le caractère grimpant de la vigne. Mais aussi de la forcer à produire des fruits de qualité destinés à l’élaboration du futur vin. Par ce biais, les vigneron·ne·s empêchent que la vigne en dormance – lorsque la sève est redescendue – cède à son naturel de liane. Ainsi, entre le mois de décembre et le mois de mars, les artisans vigneron·ne·s donnent la forme désirée aux pieds de vigne. De plus, ils préfigurent également les rendements espérés ainsi que la qualité de la prochaine récolte, en choisissant de laisser croître plus ou moins de futurs bourgeons. C’est un art délicat, sûrement un de ceux qui requiert le plus d’expérience et de connaissances. Une taille précoce sur des terroirs gélifs entraînera des risques importants, aussi les pieds reposant sur ce type de sols sont plutôt taillés en dernier. Par ailleurs, la notion d’équilibre global est là encore au cœur de cette pratique. Le type de taille choisie aura notamment un impact sur l’apparition de maladies et de champignons dévastateurs comme l’esca par exemple. La gestion des plaies de taille, par lesquelles les pieds sont contaminés, figurent ainsi au centre des préoccupations.
« La taille est un exercice physiologique. Une gestion des tannins et de la tension. » – Sandrine Farrugia et Élian Da Ros –
LES DIFFÉRENTES FORMES DE TAILLE
Il existe autant de façons de tailler que de vigneron·ne·s. Elles varient cependant, en fonction des cépages, des diverses philosophies culturales, ou encore des rendements souhaités. On distingue ainsi les différents systèmes de conduites, la forme qui est donnée à la vigne et le type de taille choisi. Taille courte ou taille longue. En cordon ou en Lyre. Ainsi, lorsqu’Élian Da Ros taille en double guyot sur les terres marmandaises, Emmanuel Rouget privilégie le guyot simple. Ce sont les conduites les plus répandues dans le vignoble hexagonal. Au cœur de la vallée de l’Agly, dans le Roussillon, Lucile et Paul Meunier taillent eux en gobelet. Au delà de la forme donnée au pied, le type de taille le plus en vue depuis quelques années est le Guyot-Poussard, du nom du vigneron de Cognac qui l’a inventé. Cette méthode vise à réduire les plaies de taille, par lesquelles tout type d’infection s’invite. En outre, elle respecte particulièrement les flux de sève afin de préserver l’équilibre du pied de vigne au maximum. Ainsi, de nombreux artisans tentent d’adapter au mieux leurs pratiques, comme observé chez l’excellent Roger Saumaize par exemple. Il en va de la qualité du futur vin comme de l’aspect durable du métier de vigneron·ne.
« Pour moi, la taille a vraiment été l’entrée dans le monde du vivant. » – Lucile et Paul Meunier –
UNE PRATIQUE EN PLEINE MUTATION
Si la pratique de la taille est aujourd’hui en pleine mutation, c’est avant tout à cause des déséquilibres observés dans de nombreux vignobles. Ainsi, des maladies comme la flavescence dorée ou l’esca sont devenues une cause de mortalité de la vigne croissante ces dernières années. C’est aussi parce que de nouvelles façons de penser l’équilibre de la vigne se sont exprimées. Face à ces phénomènes infectieux, plusieurs travaux de recherches ont été conduits. Par ailleurs, quelques voix se sont élevées pour remettre en question les méthodes de taille contemporaines. Pour défendre et porter un regard différent sur cette pratique. Parmi eux, l’un des pionniers est l’ingénieur agronome François Dal. Venu de Sancerre, il a conçu des méthodes de conduite de la vigne permettant d’enrayer la propagation des maladies, notamment en travaillant sur la circulation des flux de sève et sur la réduction des plaies de taille. Dans son prolongement, mais avec une approche sensiblement différente sur certains points, l’arboriste Marceau Bourdarias propose lui aussi de nombreuses formations sur le sujet. Il anime des conférences et prodigue ses conseils à de plus en plus d’artisans désireux de pratiquer une autre taille. Plus respectueuse de la nature.
« La résistance de la vigne ne peut pas être dissociée de son environnement. » – Marceau Bourdarias –
KL